Les Missions de La Salette au Myanmar (Birmanie)
En 1936 la Birmanie reçut l'autonomie et fut séparée de l'Inde au point de vue administratif. L'histoire d'un des territoires missionnaires les plus difficiles parmi ceux confiés aux Missionnaire de Notre Dame de La Salette commença avec l'arrivée à Akyab (Sitwe) de cinq missionnaires, le 9 novembre 1937, sous la direction du Père Thomas Newman. L'État du Arakan (Rakhine), bien que proche de l'Inde au point de vue géographique, plus tard il fera partie du Pakistan oriental (Bangladesh), appartenait alors à la Birmanie (Myanmar). La partie Arakan d'un circonscription alors sous la responsabilité des Pères de Sainte Croix fut confiée aux salettins.
C'était un territoire isolé. On ne pouvait y accéder que par bateau. Le voyage depuis Rangoon (Yangon) ou Calcutta pouvait prendre trois jours. Akyab était situé au centre de la mission, mais la majeure partie des activités avait lieu au sud, à Sandoway (Thandwe). Le Père Tom était couché avec la malaria, lorsqu'il apprit qu'un de ses confrères salettins, le Père Weslak, était malade. Il ne pouvait donc se rendre chez lui. Lorsqu'on lui dit qu'il allait mieux, il se rendit à Akyab, pour assister au départ du dernier Missionnaire de la Sainte Croix. Avant d'y arriver le 14 février 1938, Tom apprit que le P. Weslak était décédé la veille, sans que l'on sache de quelle maladie. Mais il fallait que la mission continue à vivre. Avec l'arrivée de nouveaux missionnaires, la mission présentait un aspect prometteur. Prome (Pyay), qui appartient à Rangoon, fut ajouté à la mission. En 1942 la seconde guerre mondiale atteignit la région. A cette époque le P. Phil Gardener fut assassiné à Aunglan près de Prome (Pyay) par des bandits. Ce ne fut qu'après la fin de la guerre que, dans une tombe étroite, on découvrit son corps. On avait réussi à l'identifier grâce à la présence de sa montre.
C'est après la guerre que l'activité missionnaire atteignit son sommet. Du fait que le pays continuait à être une colonie de la Grande Bretagne, il n'était pas trop difficile d'obtenir des visas. La situation changea lorsque le pays devint indépendant, le 4 janvier 1948. Il fut désormais impossible d'obtenir un visa permanent et il devenait difficile d'obtenir un visa temporaire. Le 19 juillet 1947 furent assassinés les dirigeants politiques du pays, à l'exception d'un seul. A la suite d'un mauvais rêve, ce dernier s'abstint de participer à la réunion du cabinet fantôme. Il y avait tant de problèmes dans le pays ! Les militaires reçurent le pouvoir. Au bout de quelques mois il y eut des élections. Le 2 mars 1962 le général U Ne Win prit le pouvoir, et la situation alla de mal en pis. Les émeutes et le massacre de nombreux étudiants en 1977 et en 1988 furent les moments les plus sombres dans l'histoire du pays. Il y eut de nouvelles élections en 1990, mais, du fait qu'une constitution valide n'existait pas, les élus ne purent gouverner.
Cependant les missionnaires ne perdirent jamais espoir. Ils fondèrent en 1962 à Akyab une école apostolique (petit séminaire). En 1963 ils envoyèrent leur premier étudiant (Bernard Taylor) étudier à l'étranger, aux Philippines. Son visa était limité aux Philippines, à la Thaïlande et à Hong Kong. Du fait de la nationalisation des écoles privées (les salettins perdirent quatre écoles), le petit séminaire fut fermé en 1965. Après sa fermeture, le P. Noonan s'occupa de vocations pour le diocèse et envoya les candidats au séminaire de Taunggyi. Il dut partir, parce que son visa, comme celui d'autres étrangers, ne fut pas renouvelé. A cette époque fut nommé à Prome un garde forestier catholique, dont un fils, Cornelius Kyaw Khine, étudiait la théologie à Rangoon. Mgr Newman plaida auprès de l'archevêque de Rangoon, afin qu'il fut assigné au diocèse. En 1967 il l'ordonna comme premier prêtre originaire du pays. Au cours des années soixante-dix il y eut d'autre prêtres dans le même cas : les Pères Bernard Taylor et Raphael Pho Seh en 1972, puis le Père Peter Maung Yin en 1973. Lorsqu'en 1975 il y cinq autres nouveaux prêtres dans le diocèse, les salettins décidèrent de tout passer au clergé indigène. En février 1976 Mgr Joseph Thaung Shwe devint évêque du diocèse. En novembre, après 39 années de présence, les deux derniers Missionnaires de Notre-Dame de La Salette, les Pères Charlie Gendron et Mike Blumm, quittèrent le Myanmar.
La période Latente : Les salettins partirent, mais la dévotion à Notre-Dame de La Salette demeura vivante dans le diocèse. En 1979 le P. Bernard Taylor quitta le diocèse pour rejoindre les salettins aux Philippines. Bien que les M.S. fussent absents physiquement, les gens continuaient à vénérer Notre Dame sous le titre de Notre Dame de La Salette.
Les recommencements : Au milieu des années 90, le P. Taylor se mit à recruter au Myanmar pour les salettins. Il y eut bientôt des séminaristes du Mynmar à Silang, Philippines, ensemble avec des confrères venus de l'Inde. Le 1er mai 2000 quatre salettins du Myanmar prononcèrent leurs premiers voeux. Ils furent ordonnés prêtres le 4 mai 2004. Après plusieurs visites au Myanmar, le Conseil Général décida en 2005 de rétablir la mission. Le 5 novembre de la même années les salettins prirent en charge le sanctuaire marial de Notre-Dame du Rosaire à Chanthagone ainsi que la paroisse locale, la paroisse voisine établie à Myauk Kine et la quasi-paroisse de Myitnge. Après une très longue absence, avec l'aide de l'évêque, des prêtres, des religieux et de la population de Mandalay, les nouveaux missionnaires s'adaptèrent à leur pays d'origine et à sa culture.
La révolution "saffron" eut lieu en 2007, une année difficile. Des manifestations sanguinaires dirigées par des moines bouddhiste obligèrent à retarder l'ordination du P. Thomas Htang Shan Mong. Les autorités (le délégué apostolique et le supérieur général des M.S) étaient dans l'impossibilité de venir. La première ordination salettine eut lieu le 26 octobre 2007, au sanctuaire de Notre-Dame de Mandalay, sous la présidence de l'archevêque, Mgr Paul Grawng.
Trois autres prêtres ont été ordonnés en 2008, puis un nouveau groupe de trois en 2009. Avec l'ordination de ce dernier groupe, la première partie de l'histoire de notre jeune mission atteignit son terme. A présent nous sommes chargés du sanctuaire marial diocésain de Notre-Dame du Rosaire et de quatre paroisses (Chanthagone, Myauk Kine-Myitnge, Zawgyi et Sinbyu). Trois des nôtres se trouvent au séminaire diocésain.
A côté de ces charges permanentes, les missionnaires se sont occupés de retraites, d'ateliers et de séminaires/programmes de formation au profit d'évêques, de prêtres, de religieux et de laïcs. A Chanthagone, avec l'aide financière de la Propagation de la foi, a été établi un "centre spirituel". Une nouvelle maison centrale est près de son achèvement. Elle procurera aux missionnaires un havre de paix. La tempête Nargis a été pour de nombreux confrères et soeurs de la Salette une occasion de faire preuve de générosité. Les restrictions imposées aux aides en faveur des victimes de la part d'organisations privées ou d'individus furent appliquées avec rigueur. Cependant une réglementation a beau être stricte, il y a toujours moyen de la contourner. Avec l'aide de parents et d'amis, le P. Taylor a pu secourir maints agriculteurs, orphelins et autres victimes. Il a fallu arrêter la construction d'un dispensaire. Le gouvernement prit le terrain, car il se trouve tout près de l'endroit où on pense construire un pont.
L'avenir : Les missionnaires projettent de "faire connaître le message" au moyen de "journées d'étude". Ecoutant l'invitation de Notre Dame, "Approchez", ils s'efforcent d'établir un programme bien équilibré d'apostolat, de recrutement et de formation. On étudie actuellement la possibilité d'étendre les missions jusqu'à Myitkyina, où se trouvent les Soeurs de La Salette. Il y a deux candidats, qui font actuellement leur philosophie, et quatre "regardants", qui pensent entrer chez nous. D'ici une année ou deux, certains seront prêts pour le postulat et le noviciat.
Nous veillons à ne pas nous éparpiller, tout en visant à aider au maximum l'Eglise locale et la Congrégation. S'efforçant de discerner les intentions de notre Mère bénie à l'égard des missionnaires, ceux-ci devront faire le meilleur usage possible des maigres ressources, qui consistent en dons venant de Dieu, de notre Mère, de la Congrégation, d'amis et de parents. Il faudra mettre en route le recrutement. Les salettins ont l'avantage d'être la troisième congrégation de droit pontifical présente avec des membres originaire du pays, les deux autres étant les salésiens et les Frères des écoles chrétiennes. On projette d'établir pour le Myanmar un programme de formation salettine, mais cela prendra sans doute du temps.
En dépit des restrictions et interdictions, il a été possible d'acquérir des propriétés et de bâtir. La générosité du Conseil Général et des autres provinces a supprimé les soucis d'ordre financier. On est en train de constituer un fonds pour la formation. Une fois que l'on aura trouvé un endroit convenable pour la maison centrale, sa construction sera mise en route. Elle abritera, outre ceux en formation, un centre spirituel et un sanctuaire. Mandalay se trouve juste au centre du pays et les connexions sont excellentes. Pour nous aider à faire passer son message de réconciliation, Notre Dame nous a amenés au centre du pays. Merci à tous ceux qui se sont joints à nous pour construire ces missions.
Père Bernard Taylor, MS