La jérémiade de Marie
(20edimanche ordinaire : Jérémie 38, 4-10 ; Hébreux 12, 1-4 ; Luc 12, 49-59)
On n’entend jamais parler d’une isaïade, ni d’une hoséade, ni d’une ézékiélade. Par contre, une jérémiade signifie une lamentation ardente, telle qu’on trouverait chez Jérémie. Non seulement est-ce que le Livre des Lamentations s’attribue généralement à lui, mais nul autre prophète a été tellement opposé dans sa mission, ni si mécontent dans sa vocation.
Certains éléments du message de Notre Dame de la Salette porte le caractère d’une jérémiade. Elle se plaint de la futilité apparente de ses efforts pour son peuple : « pour vous autres, vous n'en faites pas cas. »
Dans Jérémie 14, 17 nous lisons : « Que mes yeux ruissellent de larmes nuit et jour, sans s’arrêter ! Elle est blessée d’une grande blessure, la vierge, la fille de mon peuple, meurtrie d’une plaie profonde. » De même la Belle Dame pleure sur son peuple—mais aussi sur son Fils crucifié, dont elle porte l’image sur son cœur.
La croix était non seulement un instrument de torture, mais aussi de honte, comme le dit très clairement la Lettre aux Hébreux : Jésus « a enduré la croix en méprisant la honte de ce supplice. »
Crucifié entre de vrais criminels près d’une entrée de la cité, dépourvu, moqué, nu aux yeux de quiconque, Jésus a souffert des humiliations que l’on a peine à imaginer. Cela faisait partie du baptême que Jésus devait recevoir, que l’on voit décrit dans l’évangile.
L’image de Jésus crucifié est le symbole le plus puissant de l’amour de Dieu pour nous. Mais Jésus lui-même a reconnu que plusieurs le rejetteraient, et que la foi en lui résulterait en divisions. Cela n’est pas moins vrai aujourd’hui qu’alors.
C’est peut‑être pour cela que beaucoup de chrétiens portent une croix, « l’emblème de la honte et du supplice, » selon un fameux hymne américain. Nous reconnaissons que nous ne sommes pas dignes du grand don que Jésus a gagné pour nous. Il a enduré la croix, et il n’y a pas de honte à être son disciple.
Maximin a dit que se première pensée en voyant la Dame était qu’elle avait été battue et s’était évadée dans la montagne pour pleurer tout son saoul. Oui, les yeux de Marie ruisselaient de larmes à la Salette. Vivons de façon à consoler son cœur affligé.
Traduction : P. Paul Belhumeur, M.S.